Entre ses griffes T2 : LA nature des secrets - Aurore Doignies

#Polar #Bit-Lit #Romance #MxMBookmark #2015

COUP DE CŒUR

ça va faire bizarre de voir mon avis "après" que j'ai été citée par Zély.   Et non, je ne t'en veux pas pour ça, Zély

Je suis une vendue à cet auteur. J’ai un tropisme pour ses fictions. Parce qu’elle sait les raconter de manière directe, sans chichi, de façon VRAIE. Peu importe qu’il s’agisse de Bit-lit, de romance « réaliste » ou paranormale. Son propos est mature, et on n’a absolument aucun doute quant au fait que l’on tient ou lit un ROMAN lorsqu’on a une œuvre d’Aurore Doignies entre les mains.

Le problème avec les bons auteurs, c’est qu’ils génèrent des lecteurs de plus en plus exigeants. Et Oidche est indéniablement un bon auteur. Et comme je suis une perfectionniste, vous devinez donc la suite... Ma maniaquerie prend le dessus. Je me base sur mon expérience de lectrice « livrophage » (un peu chiante), pour cet avis. Toutefois, même si je n'ai pas la science infuse, je dois avouer que mon "expérience" d’auteur amateur va aussi étayer mon argumentaire.

Pour rester fidèle à mon ressenti, je m’exprimerai en termes de contraste.
Sur la forme :
L’auteur n’a pas à rougir de sa narration. La nature des secrets a des dialogues incisifs. Parfois les répliques sont cassantes, pointues, directes, percutantes. Ça donne une vie au texte, et on a plaisir à tourner les pages. Ça s'avale, ça se dévore, on n’en fait pas une indigestion, on s’en délecte.
Jusqu’à ce qu’on croque dans un grain de sable...

Je sais qu’écrire une fiction, c’est raconter l’histoire que voudrait entendre un lecteur, mais pas avec les mots auxquels il s'attend. Le challenge est donc de ne pas susciter l’inconfort de son « oreille ». Or par moment j’ai ressenti cet inconfort. J'ai une façon de lire assez curieuse. Un roman doit "chanter" à mon oreille. J'ai une sensibilité presque musicale quand il s'agit de littérature.

La première fausse note vient des phrases longues un peu déroutantes. Permettez l’expression, elles étaient « essoufflantes ». Un tic que j’ai déjà rencontré chez l’auteur, et dont j’ai déploré qu’il parasite autant le texte.
La formule : 1 phrase = 1 long paragraphe, a tendance à appesantir la lecture. On attend le point, mais cette ponctuation ne vient qu’au bout de plusieurs lignes. Pour ma part, je me retrouve un peu essoufflée à cause de la rareté de cette césure.

Second couac "narratif" qui n’a malheureusement pu que me sauter à l'oreille et aux yeux :
la formule  « participe présent au début + phrase inversé ».

Exemple:

La répétition de ce schéma m’a quelques fois donné l'impression d'un martèlement. Les paragraphes en devenaient presque mécaniques, au point de desservir le style, la dynamique de la lecture. Mon souci avec les propositions participiales a été leur fréquence dans le roman. Je n'ai pas de problème avec cette formulation. Je l'emploie aussi dans mes fictions. Ma gêne est venue de sa redondance. Presque comme un leitmotiv (même si le terme n'est pas le plus approprié.) Du coup, comme pour un leitmotiv, une fois qu'on l'a remarqué chez son interlocuteur, on se surprend à les "compter", ou à n'entendre plus que ça. Et c'est un peu ce qui s'est produit avec ce roman.

J'ai conscience que mes remarques sont étranges, mais que voulez-vous? Quand l'auteur laisse peu de place à la "critique", on cherche la petite bête. Et on finit par la trouver

Pour l'intrigue :
Je fais partie de celles qui ont lu la première version en ligne, et malheureusement mon esprit n’a pas pu s’empêcher de comparer.

Ce que j’ai apprécié dans la version précédente était son espèce de « crescendo tensionnel ». Les choses ne faisaient qu’aller en se corsant, et la surprise était créée d’une manière si inattendue que l’on évoluait dans une sorte d’incertitude captivante.

Peut-être que mon souci vient de là. Du fait que La nature des secrets n’était plus si secret que cela, pour moi. (Excepté l’intrigue policière). Alors je vais faire l’effort de me mettre dans la peau de quelqu’un qui n'aurait découvert que la version 2.0.

Miss Doignies nous prouve qu’elle est une Dame du polar, et que ses balbutiements sont à des années-lumière derrière elle. Bref, elle gère la fougère ! Surtout quand il s’agit de marier le policier à la fantasy urbaine que l’on vit entre ces pages.

Ce que j’ai particulièrement aimé est le charisme de certains personnages.
Nikandr restera à jamais mon chouchou ! Cameron a été une tête à claques, mais cela donnait une bonne consistance à son couple avec Kyren. Couple dont l'équilibre a été mis à mal et qu’ils n’auront eu de cesse de rechercher et de réajuster tout au long du récit. Bizarrement, j’ai trouvé le tempérament de Kyren très doux dans ce volet,  mettant efficacement en relief la différence avec un Alpha. Mark m’a fait sourire. Aniki m’a fait rire. Loukian m’a fait soupirer d’exaspération.

En fait, je n’ai pas été dépaysée. J’ai retrouvé mes marques avec la plupart des personnages du tome 1. Et cela parce que l’intrigue a été menée de manière très précise. Mais paradoxalement, je l’ai un peu ressenti comme un point fort et un point faible.

Point + :
L’auteur sait où elle va, ce qu’elle veut, et où elle nous emmène. Il est évident qu’une suite nous attend. Elle a distillé juste ce qu’il fallait pour nous donner envie d’y revenir. On n’en a pas vu assez sur Nikandr, sur Aniki, sur Loukian et Jacek. Et on sait qu’elle pourrait nous en raconter tellement plus qu’un roman.

Point – :
Il y avait un côté chirurgical à la chose. Personnellement, j’ai eu le sentiment que l’intrigue était disséquée avec une trop grande prudence. Il m’a manqué une espèce de « folie », et je suis un peu restée sur ma faim. Surtout au niveau de l’intrigue romantique. Sans doute parce que mes exigences ne cessent de grimper plus l'auteur se bonifie...

Si j’ai trouvé cela savamment dosé, efficace, ça restait un brin linéaire. J’aurais aimé que l’auteur  pousse les héros à bout. Qu’elle ne se montre pas « raisonnable » sur les retournements de situations. Il y a une belle succession d’actions, c’est indéniable. Mais j’aurais voulu une pointe de dramatisme, une accélération tragique. Il aurait fallu me donner l’illusion que tout était perdu. Que la relation atteignait réellement ce point de rupture. Même si, en tant que lectrice, je n’aurais pu m’empêcher de nourrir une flammèche d’espoir.

C’est là que revient le contraste avec la première version (hélas je ne peux m'empêcher de comparer c'est plus fort que moi). Dans celle que j'ai lue en ligne, l'auteur n’avait pas « craint » d’en faire « trop » au moment de l’acmé entre Cam et Kyren, suite à THE révélation. J’aurais souhaité que dans cette version, elle me les foute vraiment dans une impasse, ou les largue au milieu d'un sacré bazar, et les laisse ensuite se dépatouiller pour rectifier le tir.

Oui, je l’avoue, j’aurais voulu que Cam ne se comporte pas seulement en imbécile fini, mais en vrai salaud. Son investissement pour espérer obtenir le pardon m’aurait sans doute plus touchée, s'il avait été pis qu'odieux.

Je me suis retrouvée dans une situation où je n’ai pas pu me montrer si compatissante que cela envers les deux protagonistes, vu la manière dont le « problème » s’est réglé. Ce n'est que mon point de vue ; mais Cam  n’en a pas « bavé » assez pour regagner Kyren. Quant à ce dernier, il m’aurait fallu un degré d’anéantissement plus… comment dire…

Bon sang, Oidche m’a habituée à plus de sadisme, enfin !  Voilà, c’est dit. Je voulais qu’elle te me les fasse un peu beaucoup souffrir, ces chéris !!  

Je m'attendais à ressentir un concentré de désespoir pur des deux côtés, mais je l'ai trouvé un poil "dilué". J'espérais du corsé, j'ai eu du rosé. Je suppose que la sadique en moi s’est probablement montrée trop avide...

Au final
Le roman reste un moment de plaisir. Si l’on ressent des pointes de frustration, elles n’ont jamais l’amertume de la déception car on s’immerge aisément dans l’histoire. Et on ne peut qu’espérer que l’auteur se surpasse au tome trois. Parce qu’on sait qu’elle le peut.
(non, je ne te mets pas la pression Oidche, non!! Tu sais que  )