Voici donc la suite de Dangereusement heureux, qui se focalise cette fois sur l'histoire de Xavier. Une histoire sombre et crue à ne pas mettre entre toutes les mains.
Xavier ne s'est jamais vraiment remis du viol de sa sœur, qu'il n'a pu ni empêcher ni punir, et cherche, comme une sorte d'absolution, à faire tomber un réseau de traite des blanches en s'y infiltrant. Ne serait-ce que par le contexte, on est clairement pas chez les Bisounours, mais il y a moins de détails scabreux que dans Sous couverture, par exemple, qui abordait un peu le même thème, et c'est tant mieux. Se méfiant de ce nouveau videur, les patrons du club qui sert de vitrine discrète au trafic des filles le mettent à l'épreuve, et lui balancent dans les jambes le barman, ce pauvre Carson. Espion malgré lui, ce jeune homme réservé qui semble n'avoir ni espoir ni ambition, hormis celle de rester en vie et de garder son travail, se retrouve rapidement en enfer, menotté dans la cave de Xavier.
Complice actif, ou agneau sacrificiel, c'est que que Xavier veut découvrir, et il est prêt à franchir les limites pour le découvrir. Va alors se jouer dans ce huis-clos étouffant et oppressant, un jeu de vérité qui va changer la vie de Carson pour toujours. Car Xavier lit comme personne le cœur et l'âme des hommes, et en extirpe tous les plus terribles secrets que l'on voudrait garder cachés à jamais. Par la domination, l'humiliation, la peur, la colère, le sexe,mais aussi le plaisir, l'attention, la parole, Xavier met Carson à nu, au propre comme au figuré, couche après couche, comme on épluche un oignon. Le révélant à lui même, et le libérant, grâce à la contrainte physique, des entraves psychologiques qui depuis son enfance le détruisaient à petit feu.
Cette première partie du roman est ... étourdissante. J'ai été parfois mal à l'aise, bousculée, car si l'expression « consentement douteux » a un sens, c'est bien ici, au fond de cette cave. Mais l'accès que l'on a aux pensées les plus intimes des deux protagonistes, l'impact émotionnel et psychologique est si fort que l'on finit par ne voir que la manière dont le vrai Carson se réveille, dont il se met à exister, dont il se libère du passé. Le sexe et le BDSM comme thérapie et catharsis : c'est érotique, dérangeant, éprouvant, fascinant.
Fort heureusement l'auteur nous ménage ensuite une pause avec de beaux moments de douceur, d'amitié et de sexe tendre, lorsque Xavier demande à Dario et Aidan d'héberger Carson, recherché par son mafieux de patron. Avant que nous assistions à la chute des marchands d'esclaves, et replongions dans les turbulences de la relation passionnelle et amoureuse entre Xavier et Carson. Et dans les profondeurs de l'esprit tourmenté de Xavier, qui lui aussi va devoir cesser de se cacher à lui même ses blessures, s'il veut un jour espérer en guérir.
On aime ou en déteste ce roman, je ne pense pas que l'on puisse simplement rester tiède. Moi, j'ai aimé. J'étais totalement immergée dans l'histoire, si dure, si forte. Elle m'a pris aux tripes. Je suis admirative du travail de l'auteur sur la psychologie des personnages, qu'elle décortique et épluche jusqu'au trognon. Ce n'est pas une lecture facile, comme je l'ai dit j'ai parfois été bousculée, dérangée, poussée hors de ma zone de confort, mais ça en vaut la peine. Comme le précédent opus, et encore bien plus que lui, c'est un roman très érotique mais surtout un ouragan émotionnel. Si vous n'avez pas peur des tempêtes, foncez.
4,75/5