Ne vous arrêtez pas au titre bizarre de ce récit passionnant qui n’est pas une romance, mais un témoignage vrai, sincère et émouvant.
Jeune maghrébin de cité, Faissal comprend dès sa plus tendre enfance qu’être musulman et gay n’est pas une sinécure. Il fait alors le choix de se calfeutrer, de cacher au plus profond de lui-même cette particularité, derrière un masque d’apparence. Particularité qui paradoxalement, deviendra au fil des années sa force, galvanisera toute son énergie pour lui permettre de se jeter dans les études et de gagner sa liberté. La liberté d’être enfin au grand jour, ce qu’il est réellement.
Mais Faissal découvrira aussi qu’à l’extérieur de sa cité régie par des lois trop étroites, le monde est loin d’être meilleur, et devra faire face à la limite de nos sociétés modernes et leur hypocrisie. Un monde soit disant libre, qui n’est ni plus intelligent, ni plus généreux, ni plus tolérant, ni plus courageux.
Cette histoire est celle d’un homme impétueux, au caractère tenace, qui désire avant tout atteindre le bonheur, comme tout être humain. Un bonheur que la nature ne lui a pas offert sur un plateau, et qu’il devra gagner dans l’effort, la réflexion et la patience, l’interrogation et l’écoute. D’espoirs en désillusions, de lourds silences en débat houleux, de traditions ancestrales stupides en découvertes surprenantes, Faissal affronte pas à pas les codes de notre société stéréotypée, aux cases bien définies, dans lesquelles il faut impérativement rentrer, et nous délivre une réflexion souvent dérangeante.
De l’analyse intéressante du pouvoir des castes religieuses aux péripéties de ce jeune homme très authentique qui tente de s’initier à l’amour, le lecteur découvre la souffrance de la différence et des non-dits, les monstruosités dont sont capables certains, la bêtise et l’ignorance derrières lesquelles se cachent ceux qui ont peur de l’inconnu.
Ce livre est vraiment très bien écrit, même s’il commence par un témoignage très vivant pour basculer lentement vers un essai sur l’intégration ou les différences dans cette société française que nous voudrions présenter comme idyllique. J’ai regretté toutefois le style un peu froid, comme détaché, même si je devine qu’il correspond à la personnalité de celui qui témoigne. J’ai perçu son cheminement, tristement compris tout ce qu’il a dû s’empêcher de ressentir, j’ai reçu toute sa pudeur et sa retenue dans ce constat amer mais intelligent de la pensée commune, des préjugés débiles et des abus de la religion, aux conséquences souvent épouvantables.
Une histoire somme toute assez dure et triste, parce que même si elle se termine sur une note d’espoir, on sent jusqu’au bout la difficulté de cet homme à trouver sa place dans une société qui ne fait de cadeaux à personne, et encore moins à ceux qui s’en démarquent. Une lecture souvent difficile, mais instructive, qui nous révèle une certaine face sombre de nos sociétés soi-disant modernes et évoluées.
Ma note : 4,7/5